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Les deux portes sont décorées sur la face intérieure par deux paysages très romantiques en daguerréotypes qui pourraient être de Suisse, Bavière, Allemagne ou Italie, selon les régions. Elles sont malheureusement souffert de dégâts divers et le verre est fendu à plusieurs endroits. Mais nous avons choisi de les laisser telles quelles car le verre semble collé à l'image et cela ne pourrait que les abîmer davantage. Ouvrons donc ces deux portes pour la fin de la visite!
LA PARTIE BASSE OU ENTRESOL
La partie basse est toujours une découverte, la cerise sur le gâteau en quelque sorte, surtout si l’on attend le dernier instant avant d’ouvrir les portes, car cette partie ne laisse pas deviner une prolongation de la maison et pourrait tout simplement être un meuble de rangement. Contrairement aux autres, elle comporte trois fenêtres qui ne sont visibles que de l’arrière de la maison, ce sont aussi curieusement les seules qui s’ouvrent.
L’effet de surprise de cette partie basse est toujours enchanteur. Ce niveau recèle ce qui est souvent, et à raison, considéré comme l’âme d’une maison, sa cuisine. Il y a quelque chose qui tient au ravissement de l'enfance à contempler la nourriture miniature d'une maison de poupées ancienne, ces gâteaux si appétissants, tous ces objets désuets et poétiques. Ma mère, ma grand-mère et mes tantes paternelles étaient d'excellentes cuisinières, chacune avec leurs spécialités, et la cuisine a toujours été un endroit où j'ai connu des moments de bonheur simple, de complicité et de sécurité. Aussi, avec cette cuisine, à chaque fois que je la redécouvre la magie opère: une vraie madeleine de Proust. A coté la salle à manger et l’office sont deux pièces tout aussi envoutantes. Comme toujours on y trouvera l'amoncellement d'objets et d'ustensiles qui est une caractéristiquedes maisons de poupées, qui correspond aussi à notre propre goût, ce qui évidemment défie la logique pratique. C'est à peine en effet si l'on pourrait se déplacer dans certaines de ces pièces.
Les deux portes sont décorées sur la face intérieure par deux paysages très romantiques en daguerréotypes qui pourraient être de Suisse, Bavière, Allemagne ou Italie, selon les régions. Elles sont malheureusement souffert de dégâts divers et le verre est fendu à plusieurs endroits. Mais nous avons choisi de les laisser telles quelles car le verre semble collé à l'image et cela ne pourrait que les abîmer davantage. Ouvrons donc ces deux portes pour la fin de la visite!
La cuisine
La cuisine est remplie d'ustensiles et d'objets tous plus charmants les uns que les autres. C’est une pièce claire avec des boiseries peintes de couleur crème, une fausse porte à moulures. Un sol composé de carreaux à motif damier bleu et blanc et des murs peints en bleu. La fenêtre est également ornée de jolis rideaux en Vichy bleu et blanc avec motif brodé en croisillons. Les murs à mi-hauteur sont peints en bleu. On sait que cette couleur était souvent utilisée aux siècles derniers, bien avant l’arrivée des insecticides et des fenêtres grillagées, pour son pouvoir répulsif sur les insectes, notamment les mouches. Cela est sûrement vrai: avez-vous vu des mouches tourner autour d’un camembert ou d’une vache peints en bleu? Non, bien sûr, c.q.f.d!
L’évier est un jouet en tôle avec vrai réservoir, de marque Bing, et la cuisinière, de taille plus petite, est en tôle lithographiée. Les murs sont recouverts de moules et d’ustensiles, tous réalistes et anciens, s’étalant sur plusieurs décades. A noter l'original lustre en métal peint de couleur crème: si l'on y regarde de plus près on s'aperçoit que c'est en fait un hameçon de pêcheur au gros auquel ont été piquées trois boules de bois. Jolie idée!
Devant la cuisinière très affairée, la table est recouverte de gâteaux faits ou à faire, une vraie table de cuisine d'enfance qui, pour moi, ravive des souvenirs heureux. Le chat de la cuisine, plus rustique que le Steiff de la chambre chinoise, est en plâtre blanc et trône comme un sphinx, l’air d'avoir vu une mouche ou quelque chose. Il y a sûrement une souris dans cette cuisine! A noter la petite clochette pour appeler la servante, et le charmant petit meuble au premier plan, dont les tiroirs sont faits de boites d’allumettes. Pensez au petits secrets qu’on peut glisser à l’intérieur!
Ce qui est amusant, c'est que la seule porte de toute la maison qui ne s'ouvre pas est celle qui sépare la cuisine de la salle à manger, comme pour établir symboliquement, sont coté alchimique: un monde à part où la cuisinière un pouvoir incontestable.
La pièce attenante est la salle à manger, qui est tout à fait extraordinaire. La vraie “fausse” porte est de ce coté-ci couleur chêne foncé . La pièce a un je-ne-sais-quoi de Bavière, un petit air germanique. Toutefois les murs sont ornés à mi-hauteur d’un tissu de soie brodé authentique du 18ème de facture résolument française.
Le mobilier de la salle à manger se compose d’un remarquable ensemble de fauteuils et de chaise recouverts de tapisserie au petit point et bordés de passementerie deux tons, le tout assorti au tapis. La table est dressée pour un repas de deux personnes, avec une énorme langouste au milieu. Si jamais, cher lectrice et cher lecteur nous nous rencontrons, n'oubliez pas de me demander de vous raconter l'anecdote de la langouste de mon enfance.
Un buffet présente une jolie sélection de pichets et de chopes allemandes, ainsi qu’un délicat service à liqueur avec son plateau en fonte étain. De l’autre coté de la fenêtre, ornée de rideaux de dentelle blanche, est une grande horloge en bois.
Les murs, peints de couleur verte sont ornés d’une jolie collection d’assiettes et de plats, certains en étain, d’autres en bois tourné et peint début XIXème, également disposés sur une corniche qui fait tout le tour de la pièce. Le plafond est en linoléum ancien rouge sang-de- boeuf, auquel est suspendu un lustre en fil de fer avec des chandelles. A noter au premier plan, le poèle en céramique d'un beau vert vernissé. Une porte à double battant donne sur l’office, qui traditionnellement se trouve entre la cuisine et la salle à manger, ce qui n’est pas le cas ici.
Comme dans presque toute les pièces on remarque, dans les photos plus anciennes de ce décor, ici et là, des pièces qui n'y sont plus, et d'autres qui les ont remplacées. C'est que, décorateurs sans repos, nous jouons véritablement avec cette maison, qui est bien vivante, à la différence de cette pauvre langouste!
L'office
L'office est en général une pièce qui se situe entre la cuisine et la salle à manger et qui sert de desserte et de rangement. C'est un lieu où l'on supervise la bonne marche des plats qui viennent de la cuisine qui nous a été emprunté par les Anglais pour un faire "the office", le bureau. Mais ici, l'office est placé de l'autre coté de la salle à manger, ce qui en fait plutôt une pièce à débarras. D'ailleurs, elles est pleine comme un oeuf, on ne pourrait certainement pas en faire un lieu de passage!
Les murs de cette pièce sont peints en un beau rouge sang de boeuf avec des panneaux encadrés de moulures peintes en marron brillant. Le plafond est en linoléum rouge identique au plafond de la salle à manger. Peut-être dans le passé a t'elle été un fumoir, qui par la suite a été déplacé au premier étage, on ne le saura jamais. Comme pour la salle à manger, le sol est en moleskine vert bouteille,
Cette pièce est remplie d’un bric à brac poétique et a une merveilleuse atmosphère lorsque la lumière naturelle entre par la fenêtre ou bien quand elle est éclaire à la bougie, comme ici, l'espace d'un instant. Elle évoque pour moi les souvenirs d’enfance, le jeu de cache-cache, les odeurs de cuisine et de pâtisserie, de linge propre parfumé à la lavande. S’y empilent nombre d’assiettes en céramique décorée, de saucières, de pichets, de plats, de bougeoirs.
On y voit aussi trois cocottes à pâtés, en terre cuite, en verre pressé et en opaline. Au premier plan se trouve une petite cage à oiseaux allemande ancienne avec toit en celluloïd, un cadeau de mon amie Marie Bailhache, sur une chaise de style Henri II. A remarquer aussi dans cette pièce, l’armoire remplie de nappes et de linge et un pétrin pour faire lever le bon pain au levain.
Vico le dalmatien: l'original et la copie.
Pas de Noël sans dinde dans la Lala House!
The Lala House existe désormais en livre: 124 pages, avec de nombreuses photos inédites, couverture rigide avec jaquette: Vous pouvez le commander directement de BLURB
La visite de la Lala House s’achève et j’espère que vous aurez passé un bon moment. Avant de quitter l’office et de fermer les portes, si vous regardez soigneusement sur le haut d’une des portes de l’armoire, vous pourrez voir ...miss souris qui vaque à ses affaires. Elle a l'air bien tranquille et pas du tout inquiète, et pour cause: elle n’a pas grand-chose à craindre.
Car telle est la vie ordinaire d’une maison de poupées. Les chats Steiff ou en plâtre moulé ne chassent pas les souris, ils ne font que s’étirer ou rêvasser sans fin, ces canards en porcelaine ne finiront certainement pas en pâtés et la langouste cuisinée ne poussera jamais de cris perçants comme celles que l'on ébouillante ébouillante au nom de la sacro-sainte gastronomie, et pour cause: la main anonyme qui l'a créée et peinte, rose à souhait, lui a épargné toute souffrance. Toutes ces représentations animales se contentent d’être parfaitement décoratives, ce qui est une raison suffisante pour qu’on les laisse vivre en paix, le plus longtemps possible...
Plutôt que la dénommer "La maison jaune", BillyBoy* a baptisé cette maison "The Lala House", lorsque nous l'avons récupérée il y a une vingtaine d'années. Une attention qui m’avait particulièrement touché à l'époque. J'ai passé depuis tellement d'heures à décorer cette maison, à la photographier, à l'emballer et la déballer au gré de nos déménagements successifs que j'ai vraiment l'impression d'y habiter, par procuration en tous cas. Depuis un an, je la vois tous les jours puisqu'elle se trouve dans ma chambre. C'est une maison quasi métaphysique. C'est aussi un véritable jouet, car sans cesse nous l'améliorons, nous changeons un objet ou un meuble ici ou là....comme dans notre vraie maison, suivant le principe de l'accumulation qui est le processus de toute vie. Réelles et irréelles à la fois, les maisons de poupées sont toujours magiques.
Quoi qu'il en soit, je saurai où me réfugier si jamais, comme le héros du film éponyme, je passais à travers un nuage radioactif et devenais "l'incroyable homme qui rétrécit".
Lala J.P Lestrade
Textes et photos © Septembre 2003-Octobre 2012
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